samedi 15 mars 2014

Kazimierz, véritable lieu de mémoire et/ou décor de cinéma ?

Vue du quartier de Kazimierz à l'époque moderne
Que reste-t-il du quartier de Kazimierz ; de ce qui fut, à compter de la fin du XVè siècle, le principal lieu de vie des juifs de Cracovie ?
Alors qu’il abritait une bonne partie des 65 000 juifs que comptait Cracovie à la veille de la guerre – soit un quart de la population totale de la ville – ce quartier peuplé aussi de catholiques ne compte plus aujourd’hui que quelques centaines de juifs dont seulement 190 pratiquants officiellement inscrits auprès des différentes synagogues.
Séparé initialement du reste de la ville par un bras de la Vistule, le quartier, qui doit son nom au roi Casimir le Grand, fut progressivement vidé de ses habitants juifs au gré des expulsions successives.
En l’absence de signes tangibles dans la rue, parmi la foule, c’est par ses monuments que la réalité de l’implantation passée et actuelle de la communauté juive se révèle. Si bains publics rituels, abattoirs et synagogues étaient traditionnellement constitutifs de l’identité du quartier juif, il ne subsiste aujourd’hui qu’une partie des cimetières historiques et de nombreuses synagogues, pour partie transformées en musées du folklore juif à l’instar  de la Vieille Synagogue.
On peut encore arpenter en toute quiétude les allées silencieuses des cimetières dont certains semblent presque à l’abandon et déambuler entre les maceva, ces pierres tombales si caractéristiques, souvent fendillées faute d’entretien par de trop rares descendants des défunts.
C’est l’inauguration en 1988 d’un festival de la culture juive et, surtout, la sortie en 1991 du film de Spielberg la Liste de Schindler, tourné en partie dans le quartier notamment rue Meiselsa, qui marquent le renouveau de Kazimierz. Depuis lors, cafés et restaurants aux façades ornées d’inscriptions hébraïques ou assimilées, et arborant d’ostensibles étoiles de David ont ouvert, avides de profiter de la manne financière générée par ces événements médiatiques.
Photo: Thierry Flammant
On reste parfois dubitatif devant la noria des voiturettes qui vont et viennent en tentant d’attirer des touristes cosmopolites en mal de pittoresque. La place Sveroka, pourtant cœur historique, est ainsi désertée par les habitants du cru au profit de la place Nouvelle construite au XIXè, désormais jugée plus authentique.
Au fond, le quartier semble avoir été victime de son succès médiatique et d’y avoir perdu un peu de son âme.
Philippe Couannault

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